2022. Dans une France où les violences entre extrémistes musulmans et identitaires se multiplient, les élections présidentielles portent au pouvoir, à l’issue d’un second tour mouvementé qui l’oppose à Marine Le Pen, Mohammed Ben Abbes, leader de la Fraternité musulmane. Dès son élection, celui-ci met en place une série de réformes visant à appliquer une version douce de la charia – avec, comme mesure emblématique, l’exclusion des femmes de la vie publique...
En France, la rentrée littéraire a été marquée par le référent chrétien, à tel point que L’Obs n’a pas hésité à titrer : « Dieu fait sa rentrée littéraire ». Dieu, la foi, la quête de sens spirituel, le catholicisme, le christianisme, les catholiques, les chrétiens et les convertis (à savoir les conversions tant à la religion qu’à l’athéisme) sont en effet convoqués dans un nombre remarquable de romans : Le Royaume d’Emmanuel Carrère, Une éducation catholique de Catherine Cusset, Excelsior d’Olivier Py, La vie de Jude, frère de Jésus de Françoise Chandernagor, Son visage et le tien d’Alexis Jenni ou encore le prix Goncourt Pas pleurer de Lydie Salvayre. Cette floraison est significative : pour les éditeurs, le sujet constitue un marché potentiel — et ils ont raison.
Régulièrement, les musulmans et les Arabes se plaignent de ce que l’Occident chrétien méconnaisse leur culture. Plus exactement, ils souffrent de l’image simplifiée, voire caricaturale et stéréotypée véhiculée à leur sujet. En ce qui concerne la religion, ils dénoncent une perception monolithique de l’islam, comme si, à l’instar des autres religions, celui-ci n’était pas constitué de courants divergents, comme si les croyants qui s’en réclament étaient tous de zélés dévots. En ce sens, il est vrai que les médias accessibles en Occident pour pénétrer au cœur de cette culture très diversifiée ne sont pas légion. Souvent surtout, ils ne sont pas traduits. C’est notamment le cas de la littérature arabe, qui permet d’ouvrir un univers de connaissances tout en nuances, comme le montre l’ouvrage récent de Xavier Luffin — qui enseigne les langue et littérature arabes à l’Université libre de Bruxelles —, intitulé Religion et littérature arabe contemporaine.
L’histoire d’amour ou le mariage entre un musulman et une chrétienne, qu’elle soit arabe ou européenne, est un leitmotiv dans la littérature arabe contemporaine. On le retrouve déjà dans les romans historiques de Jirji Zeydan au début du 20e siècle, dans les romans décrivant la période coloniale, comme ceux des Syriens Fawwaz Haddad et Ulfa Al-Idlibi, dans les romans postcoloniaux comme Saison d’une migration vers le nord du Soudanais Tayyib Saleh ou Vienna 60 de l’Egyptien Youssef Idris – deux livres où l’image de la femme occidentale est par ailleurs assez irrévérencieuse – jusque dans la littérature actuelle.
La mort de Mohammed Bouazizi, simple vendeur de rue, a entraîné l’année passée un soulèvement sans précédent en Tunisie, un pays connu pour la sévérité et l’efficacité de son système répressif. Le soulèvement en question a finalement conduit à la chute du régime de Ben Ali, en janvier 2011, et surtout il a inspiré bien d’autres peuples du Proche-Orient : les uns, en Egypte et en Libye, ont eux aussi poussé leurs dirigeants vers la sortie. D’autres ont eu moins de succès, à Bahreïn notamment, où la répression a pu contenir les velléités de changement d’une partie de la population.