Lorsque l’empire russe s’empare, sous Catherine II, d’une portion importante du territoire polonais, notamment lors de la Deuxième (1793) et de la Troisième (1795) Partition de la Pologne, c’est une masse de Juifs qui, du même coup, passent sous son contrôle. Les discriminations héritées de la domination polonaise se maintiennent dans le nouveau contexte.
La tsarine décrète par ailleurs l’instauration d’une Zone de Résidence (qui comprend la Pologne et, pour un temps, la Crimée) que les Juifs ne peuvent quitter sans autorisation expresse. Il y ont certes le droit de vote aux élections municipales, mais à hauteur d’un tiers seulement des électeurs... Ils échappent à la conscription, moyennant une imposition compensatoire double de celle infligée à d’autres minorités, jusqu’en 1827.
Nicolas Ier leur étend alors l’application d’un système visant à les intégrer, comme d’autres minorités, à la société russe. Les jeunes garçons – quatre pour mille mâles – sont, au terme de six années d’éducation dans des collèges militaires, enrôlés dans l’armée d’active pour une durée de... vingt-cinq ans (ultérieurement réduits à vingt, puis à douze). Ce sont les cantonistes, dont l’expérience laissera un souvenir terrible. Il incombe aux communautés de désigner les malheureux, ce qui donne lieu à toutes les injustices. Une discrimination portant sur les conditions d’âge du recrutement (12 ans pour les seuls Juifs) gonfle hors de proportion le nombre de cantonistes juifs. Les pressions à la russification et donc à la conversion, condition de l’avancement (pas de nourriture kasher), sont massives. Il faudra attendre 1856 pour que l’odieux système soit aboli par ukaze d’Alexandre II. Entretemps, près de 70.000 Juifs en ont été victimes.
L’assassinat d’Alexandre II, le Tsar libérateur (il a aboli le servage en Russie), que l’on impute aux Juifs, déclenche en 1881, sous son successeur, le réactionnaire Alexandre III, une vague de pogroms qui durera jusqu’en 1884 : 166 villes d’Ukraine sont touchées, des milliers de foyers juifs détruits, il y a des morts et d’innombrables blessés. La loi bannit les Juifs des localités de moins de 10.000 habitants, même dans la Zone, ce qui condamne à mort nombre de bourgades juives. Des restrictions drastiques s’abattent sur l’accès des Juifs à l’enseignement secondaire et supérieur, ainsi qu’aux professions juridiques. Ils sont chassés de Kiev en 1886 et de Moscou en 1891. En 1892, on leur interdira d’élire et d’être élus aux conseils municipaux, même là où ils représentent une majorité de la population... Entre 1903 et 1906, alors qu’éclate la Première Révolution russe, une nouvelle vague de pogroms fait un millier de morts et plus de 7.000 blessés.
Confrontés à l’oppression et à la misère, nombre de Juifs adhèrent aux mouvements progressistes et révolutionnaires, libéraux ou marxistes, quand ils ne les créent pas. C’est l’époque où naissent notamment, en milieu juif, le mouvement sioniste et le Bund (mouvement marxiste révolutionnaire, mais nationalitaire). L’alternative à la lutte pour plus de dignité sur place est l’émigration de masse, principalement vers le Nouveau Monde : entre 1880 et 1928, 1.750.000 Juifs quitteront par exemple l’empire pour gagner les seuls États-Unis.
L’Union soviétique, qui naît de la Révolution de 1917, instaure le régime bolchevique. Tôt mise en place, la Yevsektsia (Section juive du parti communiste) a pour mission de détruire toute expression nationalitaire juive, et au premier chef le sionisme et le bundisme. Au nom de l’internationalisme prolétarien, l’héritage religieux et culturel juif est qualifié – à l’instar de celui d’autres nationalités – de « bourgeois », ce qui signe en principe son arrêt de mort. Quant à l’antisémitisme, il est dénoncé, mais simultanément nié dans sa triste originalité, puisque, selon Lénine, il n’est rien d’autre qu’un « essai en vue de dévier sur les Juifs la haine des travailleurs et des paysans ». Cette lecture du phénomène en termes de technique politique utilisée par l’ancien régime comme arme dans la « lutte des classes » (le concept clé du marxisme-léninisme), prévaudra tout au long de l’ère soviétique.
Le même contexte idéologique explique la négation de la dimension spécifiquement juive de la Shoah, présentée comme ensemble d’atrocités perpétrées à l’encontre de citoyens soviétiques (ou, sous d’autres latitudes, polonais, hongrois...).
La haine des Juifs perdure dans les faits. Entre autres exemples qu’on pourrait multiplier : la répression des intellectuels juifs entre 1948 et 1953 sous Joseph Staline, qui associe volontiers les Juifs au « cosmopolitisme » et au pro-américanisme. L’exécution, le 12 octobre 1952, lors de la « Nuit des poètes assassinés », de treize écrivains yiddish de premier plan (Peretz Markish, Leib Kvitko, David Hofstein, Itzik Feffer, David Bergelson...) symbolise bien, même dans le contexte d’une société révolutionnaire qui prétendait bâtir l’universalisme concret, la durable survivance de la hargne... Non moins d’ailleurs que le « Procès des Blouses blanches » (1953), où des médecins et pharmaciens, principalement juifs, sont accusés d’avoir empoisonné de hauts dirigeants du Parti : plusieurs centaines de personnes seront arrêtées...
Aujourd’hui, la Russie post-soviétique peine à redéfinir ses normes sociales et politiques. Et dans le bouillonnement idéologique qui la caractérise, on ne s’étonnera pas de redécouvrir, sous des étiquettes mises à jour, des haines fort traditionnelles. Des mouvements fascisants tel Pamiat (Mémoire) semblent renouer à l’identique avec toutes les obsessions antisémites de l’époque tsariste...
Le premier pogrom de Kichinev (1903) fut mené par des prêtres orthodoxes. L’Église orthodoxe, que ce soit en Russie ou ailleurs, partage évidemment l’héritage commun du christianisme. Peut-être l’attention toute particulière qu’elle porte au message des Pères de l’Eglise de langue grecque et des premiers conciles la rend-elle particulièrement sensible aux vitupérations antijuives de certains d’entre eux. Elle présente au cours des siècles la même attitude faite de haine et de peur des Juifs que celle du christianisme latin, avec – dans des contextes de mutation sociale, économique, religieuse ou politique – une aptitude identique de ses couches populaires à fournir des contingents de fanatiques capables de pillage et de meurtre.
Cela dit, l’intrication institutionnelle de l’Église dans l’appareil d’État, héritée du « césaro-papisme » byzantin, est fort éloignée de l’autonomie qui caractérise sur ce plan l’Église catholique par rapport aux États (et à l’Empire). Une institution telle que le Saint Synode étant essentiellement une section du gouvernement, il est particulièrement malaisé de mesurer la responsabilité propre de la hiérarchie religieuse – si claire en Occident – dans les décisions antijuives. On doit la supposer considérable. De fait, jamais l’autorité religieuse ne prit en Russie des mesures pour protéger les Juifs, comme le fait est attesté en Occident latin, contre la violence populaire. Qu’elle n’ait jamais adopté de position officielle sur les Juifs n’a pu qu’encourager la haine des Juifs à laquelle prêtres, clercs et moines n’étaient que trop portés.
Jacques Déom (ULB).
"Le parti islamiste Ennahda, qui domine l'Assemblée nationale constituante (ANC), en Tunisie, a annoncé, lundi 26 mars, son soutien au maintien de l'article premier de la Constitution de 1956, qui suscite des tiraillements politiques entre modernistes et islamistes. Cette décision va à l'encontre des demandes formulées par les islamistes pour que la charia (la loi islamique) soit reconnue comme source principale de la législation dans la nouvelle Constitution du pays" - Ennahda contre l'inscription de la charia dans la Constitution tunisienne (AFP et AP, Le Monde)
"Pour la première fois aux Etats Unis, un évêque catholique comparaît devant la justice pour avoir couvert des prêtres pédophiles. Son procès s’est ouvert le 26 mars. Il risque 14 ans de prison" - Pédophilie: un évêque américain dans la tourmente (P. G., Catho.be)
"La sanglante fusillade de Toulouse a été vécue comme un véritable drame familial en Israël. Les radios, les principales chaînes de télévision ont suivi le drame minute par minute comme s'il s'agissait d'un attentat commis dans une école de Tel-Aviv ou de Jérusalem, avec des témoins interrogés en direct aussi bien en français qu'en hébreu" - Israël ressent la tuerie comme un drame familial (Marc Henry, Le Figaro)
"La tuerie lundi dans une école juive française a provoqué des réactions indignées à travers le monde, et un renforcement des mesures de sécurité autour d'intérêts juifs dans certains pays d'Europe" - Fusillade Toulouse: "Meurtre odieux de Juifs" (AFP, La Libre Belgique)
"Le rabbin Jonathan Sandler est mort avec ses deux fils Arieh, 5 ans, et Gabriel, 4 ans, et laisse une veuve et une petite fille. L'enseignant était natif de Bordeaux, où il a vécu avec ses parents" - Toulouse : Jonathan est mort aux côtés de ses deux fils (Jean-Wilfrid Forquès, Le Figaro)
"Anne Frank est devenue mormone. Vous ne le saviez pas ? Elle non plus. Elle a été baptisée en février à titre posthume par l'Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours (LDS)" - États-Unis : Anne Frank baptisée par les mormons (Hélène Vissière, Le Point. Photo : Deutsche Post)
"Le camp du Guide suprême de la Révolution iranienne Ali Khamenei aurait remporté plus de 75% des sièges aux dernières élections législatives. Cela constitue une défaite pour le président Mahmoud Ahmadinejad et ses partisans. Analyse de ces résultats et bilan de la situation avec Farhad Khosrokhavar, directeur de recherche à l’EHESS et spécialiste de l’Iran" - Ahmadinejad affaibli par les législatives au profit du Guide suprême (Matthieu Mégevand, Le Monde des Religions)
Le vote des musulmans va-t-il décider de l'avenir politique de l'Uttar Pradesh, l'Etat le plus peuplé de l'Inde ? Le rôle de la minorité religieuse dans le processus électoral est au cœur des analyses — Les musulmans très courtisés (Naïké Desquesnes, Le Courrier international)
En ce 27 février 2012, l’Inde célèbre un sombre anniversaire. Il y a 10 ans, au Gujarat, bastion des nationalistes hindous, l’incendie d’un train déclenchait l’un des pogroms les plus violents de l’histoire du pays. Plus de 2000 musulmans ont trouvé la mort dans ces émeutes — 10 ans après le massacre des musulmans au Gujarat (Camille Dubruelh, Le Monde des Religions)The prominent place of religion and of religious references in American public discourse is one of the most salient differences between the US and Europe. From elected officials taking the oath of office on the Bible, “In God We Trust” on coins and bills, “God Bless America” at the end of every speech and candidates speaking candidly about their beliefs, religion is seemingly everywhere.
This impression is strengthened when one looks at the numbers. Indeed, according to the Pew Research Center, 50% of Americans consider religion to be very important in their life while only 21% of Germans and 13% of French people feel the same way. And 55% of Americans attend weekly services. However, if one takes a less western-centric perspective, Europe is the secular exception in a world that remains religious to a large extent.
In a number of twentieth-century critiques of Methodism (and notably in E.P. Thompson’s Making of the English Working Class), John Wesley’s discourse has been represented as an instrument in the conversion of the factory proletariat to the industrial work ethic, symptomatic of an emerging ideological paradigm heavily conditioned by the demands of increasing industrialization. While the data adopted as evidence by the critics are authentic, an analysis of the discourse in context reveals that not only have the instances of Methodist discourse been selected and combined to tie in with a particular reading of reality – religion as the opiate of the people – but also that the value judgment fostered by this partial representation has been applied indiscriminately to Methodism as a whole, with blatant disregard for the positive transforming power it exerted both on individuals and on society.
As a matter of intellectual honesty, the use made of Scripture must remain faithful to the original text and intention (inasmuch as these may be retraced). At the point where religious language comes to be fraught with ideology (or vice versa), the emerging discipline of Critical Discourse Analysis may prove useful inasmuch as it (re)places instances of language within their full co-text, con-text and inter-text and seeks to denounce cases of manipulation wherein texts are read according to a system or set of values altogether extraneous to it, or alienated from their original meaning or purpose.
I would like to illustrate this point by means of the case example of George W. Bush's recourse of religious language and categories to justify (notably) U.S. foreign policy and beyond that, to serve his own electoral purposes.
Il y a désormais 25 ans que la République socialiste du Vietnam a proclamé son entrée dans l’ère du đổi mới, ce lorsqu’au cours de son VIè Congrès (1986), le Parti communiste du Vietnam (PCV) a entériné le choix d’instaurer une politique de renouveau. Un quart de siècle donc que la voie de la modernisation et de l’intégration internationale suit la forme originale d’une « économie de marché à orientation socialiste », pas si éloignée de « l’économie socialiste de marché » chinoise, mais pas identique pour autant. Comme toujours lorsqu’on évoque le Vietnam, la tentation est grande de se référer à l’empire du milieu, en identifiant l’un à l’autre, certes par un changement de distance focale mais sans en changer pour autant l’angle de vue. On rappelle pour cela les siècles d’histoire commune (sous formes de rapports colonial, tributaire ou égalitaire), les voisinages linguistiques et culturels, les similitudes des politiques menées, la concordance dans les transitions de l’Etat. Dans le contexte de mondialisation, la quête d’un modèle de développement qui serait propre à chacune de ces républiques socialistes est bien évidemment identique.
"L'Allemagne, où l'islam est devenu la troisième religion, va pour la première fois former cette année des imams dans ses universités, notamment à Osnabrück où des prédicateurs suivent déjà une formation continue" - L'Allemagne va former des imams dans ses universités (AFP, La Libre Belgique. Photo : LooiNL)
"La subvention de 400 000 francs destinée à la rénovation de la basilique Notre-Dame est considérée comme illégale. Un collectif dépose une plainte" - Un collectif accuse la Ville de subventionner illégalement un lieu de culte (Olivier Francey, Tribune de Genève)
"La police new yorkaise surveille de près les musulmans. Une polémique en cours depuis l'automne dernier mais qui enfle avec de nouvelles révélations : les policiers new yorkais ont opéré largement en dehors de la ville et ont notamment espionné les milieux universitaires" - USA: des universitaires musulmans sous surveillance (Robin Cornet, RTBFInfo)
"Le parlement a voté lundi en faveur d’un allongement de la liste des 14 Eglises et communautés religieuses officiellement reconnues en Hongrie" - Eglises : la « golden liste » allongée (Hulala)
"Le dernier ouvrage de Gilles Kepel, Quatre-vingt-treize (Gallimard), nous plonge au cœur de l’islam de France tel qu’il s’est construit dans le département emblématique de la Seine-Saint-Denis depuis 25 ans" - L'islam du "neuf trois" décrypté par Gilles Kepel (Matthieu Mégevand, Le Monde des Religions)
"Les sex-toys vendus dans une boutique du quatrième arrondissement de Paris sont-ils des objets à caractère pornographique», ou simplement des objets érotiques? Le tribunal de Paris doit répondre ce mercredi à cette question, dans le cadre d'un procès qui oppose deux associations catholiques à une boutique de sex-toys, installée à moins de 200 mètres d'une école" - Jugement attendu pour le procès d'un love shop à Paris (Cyrille Vanlerberghe, Le Figaro)
"Et si le véritable effort pendant le Carême était de réduire l’utilisation de Facebook ou de Twitter, en particulier pour la jeune génération ? Bref, d’être moins accroché à Internet et aux réseaux sociaux, comme une réponse au message de Benoît XVI pour la Journée mondiale des communications sociales ?" - Pour le Carême, ils font le jeûne des réseaux sociaux (Hugues-Olivier Dumez, La Croix)
Sous la question de la viande halal, celle de la traçabilité - Idées de Florence Bergeaud-Blackler, anthropologue, chercheuse associée à l'Institut de recherches et d'études sur le monde arabe et musulman (Le Monde)
""We don't want this material to be secret," said the archivist, waving at an endless row of shelves packed with fading documents that disappeared off into the darkness. "I am really happy people will see what a rich patrimony we have," he added, before wandering further into the bowels of the Vatican's Secret Archive" - The Vatican's Secret Archive: selected papal documents go on display in Italy (Tom Kington, The Guardian)
"Dans le cadre de notre dossier “Peut-on encore critiquer l’Islam ?”, vous avez posé vos questions à Michaël Privot, islamologue et membre des Frères musulmans. Résumé" - Michaël Privot : "La critique est mal reçue par les musulmans, pas par l'islam" (Le Vif l'Express)
"Le « burqa bla-bla » de l'ULB a soulevé de nombreuses questions, dont celle de la liberté d'expression. Tabou, l'islam ? Mais qu'en pensent donc les musulmans ?" - Tabou, l'islam ? Qu'en pensent les musulmans ? (Marie-Cécile Royen, Le Vif l'Express)
"Les députés wallons planchent sur un projet de décret qui établirait un cadastre des lieux de culte classés. Ce document renseignerait notamment sur leur état et leur fréquentation afin d’envisager la réaffectation de certains d’entre eux" - Le PS veut « screener » les églises classées (P.G., Catho.be)