Samedi 27 avril 2024
Schreiber

Schreiber

Les articles 10 et 11 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 ont aboli la notion de blasphème en tant que blasphème, ce dernier ne pouvant être sanctionné que lorsqu'il y a abus ou trouble à l'ordre public : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la loi » (article X) ; « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté, dans les cas déterminés par la loi » (article XI). La Révolution française représente une rupture en la matière, voire une inversion : la Terreur désinstitutionnalise la religion dans l’espace public — ce qui est déjà très sacrilège — et le droit se débarrasse progressivement de l’inscription du péché de blasphème dans ses textes.

Ce qui ne veut pas dire, loin de là, que le droit a définitivement mis au rencart la répression de ce qui paraît blasphématoire aux yeux de certains. Certes, en 1952, la Cour suprême américaine, dans le fameux arrêt « Baurstyn contre Wilson » a déclarée anticonstitutionnelle — le 1er amendement à la Constitution garantissant la liberté d'expression — l'interdiction du court-métrage « Le Miracle » de Roberto Rossellini, un film jugé blasphématoire. Tandis que la société américaine, dès lors privée de recours judiciaire pour faire valoir sa frilosité morale, a plutôt usé de l’auto-censure, ailleurs, en revanche, le délit de blasphème a continué de nourrir la censure légale, plusieurs décennies durant.

En Allemagne, l'article 166 du Code pénal, punit en effet le blasphème jusqu'à trois ans d'emprisonnement, s'il y a trouble de la paix civile ; il est incorporé aussi dans le droit de l'Alsace-Moselle, qui n’est pas soumise à la loi de séparation française de 1905. C'est le cas aussi en Autriche (articles 188, 189 du Code pénal), au Danemark (sections 140 et 266b du Code criminel), en Finlande (section 10, chapitre 17 du Code pénal), en Irlande (article 40 de la Constitution) ou en Espagne (article 525 du Code pénal) — qui sous le franquisme incarcéra notamment le dramaturge Arrabal pour crime de blasphème.

C’est le cas aussi en Italie, ou en vertu d’un code pénal datant du fascisme, les délits d’outrage à la religion ont été atténués non par une révision du Code mais par des arrêts de la Cour de Cassation (la loi italienne de 2006 a réformé le code pénal fasciste, sans supprimer l’incrimination de blasphème, mais en en modifiant le régime des sanctions). C’est le cas en Norvège (loi de 1930), aux Pays-Bas (article 147 du Code pénal, utilisé sans succès pour la dernière fois en 1968), en Pologne, en Suisse (article 261 du Code pénal) ou au Royaume-Uni — où la loi ne s'applique toutefois qu'à l'Église anglicane, de sorte que la plainte déposée contre les Versets sataniques de Salman Rushdie au motif qu’ils blasphèmeraient l’islam y a été rejetée.

Dans la plupart de ces derniers pays, les dites dispositions légales n'ont en réalité jamais ou peu été utilisées ; souvent, aucune jurisprudence n'est même citée. En Grèce toutefois, l’article 198 du Code pénal punit celui qui, en public et avec malveillance, offense Dieu de quelque manière que ce soit, et celui qui manifeste en public, en blasphémant, un manque de respect envers le sentiment religieux. Cette loi a encore été utilisée en 2005 pour faire condamner à six mois de prison in abstentia l'illustrateur autrichien Gerhard Haderer, et ce pour une bande dessinée jugée blasphématoire, interdite de parution en 2003 — la Cour d'Appel a par la suite levé cette interdiction, sous la pression de l’Union européenne.

La Vie de Brian des Monthy Python fut interdit pendant huit ans en République d'Irlande, et pendant un an en Norvège ; la publicité en Suède annonça ainsi avec beaucoup de malice, en référence à cette interdiction voisine : « Le film tellement drôle que les Norvégiens ont dû l'interdire ». Le film ne fut pas distribué en Italie avant 1990, onze ans après sa sortie. Il fut proscrit à Jersey jusqu'en 2001, et même alors, il fut interdit aux moins de dix-huit ans.

En France, comme dans quelques autres pays — dont la Belgique —, le délit de blasphème n'existe pas (notons qu’en ce qui concerne la Belgique, le code pénal prévoit en son article 144 que « toute personne qui, par faits, paroles, gestes ou menaces, aura outragé les objets d'un culte, soit dans les lieux destinés ou servant habituellement à son exercice, soit dans des cérémonies publiques de ce culte, sera punie d'un emprisonnement de quinze jours à six mois et d'une amende de vingt-six euros à cinq cents euros). Toutefois, les lois françaises de 1881 sur la liberté de la presse (renforcées par l’arsenal anti-discriminatoire de la loi Pleven de 1972) y sanctionnent l'incitation à la haine ou à la violence en raison de la religion (art. 24) ou la diffamation contre un groupe religieux (art. 31). Ainsi, souvent, la loi Pleven ou d'autres instruments juridiques, conçus comme plus efficaces que des lois anti-blasphème, sont aujourd’hui utilisés ou manipulés par ceux qui entendent poursuivre pour blasphème sous le couvert d’injure faite aux religions, et qui inversent à cette fin le sens de la rhétorique des droits de l’homme.

Le droit international, enfin, a du mal à intégrer cette notion ; ainsi, la Cour européenne des Droits de l’Homme a considéré que les Etats sont plus à même que le juge international d’apprécier la légitimité d’une restriction à la liberté d’expression destinée à protéger leurs concitoyens de ce qui peut les heurter. Elle a, en 1994, conforté la décision de la justice autrichienne dans l’affaire Werner Schroeter — le réalisateur et metteur en scène allemand auteur du Concile d’Amour, attaqué par le Otto Preminger Institut —, ou celle de la censure britannique dans l’affaire Nigel Wingrove en 1996 — du nom du cinéaste auteur du court-métrage Visions of Ecstasy.

Dans ces deux arrêts, la Cour de Strasbourg a considéré qu’en matière de liberté d’expression, les opinions dites blasphématoires relevaient d’une catégorie particulière, alors qu’habituellement la Cour est dans sa jurisprudence plutôt attentive à ce que la liberté d’expression proclamée dans l’article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l’Homme soit pleinement respectée. Et ce alors que l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe recommande quant à elle la suppression du délit de blasphème dans le droit interne des Etats affiliés.

Déduisant de la liberté de religion le droit d’être protégé contre des propos diffamant la religion et donc pour un justiciable de ne pas être insulté dans ses sentiments religieux, la Cour de Strasbourg a ainsi assimilé la diffamation de ce qui est considéré comme sacré par les religions à la diffamation des personnes — justifiant dès lors des éventuelles restrictions à la liberté d’expression. Mais en réalité, aux Etats-Unis surtout, et en Europe davantage chaque jour désormais, c’est l’auto-censure qui prévaut, de sorte que c’est moins dans la répression que dans la prévention du supposé délit de blasphème que s’inscrit la tendance, en ce début de XXIe siècle.

Il s'agit donc aussi, au regard de sa profondeur historique et de l’état moral de nos sociétés, d’interroger la question du blasphème ou ses expressions contemporaines dans les législations nationales, tout autant que les restrictions à la liberté d'expression dans le droit international, ainsi que le recours à des arguments religieux comme le blasphème dans des revendications de type ethnique ou identitaire. Et ce parce que dans des pays vivant sous le joug de la loi religieuse, mais également dans nos démocraties libérales, le « religieusement correct » revient en force aujourd’hui et contribue, notamment en usant de l’argument de la diffamation religieuse, à brider la liberté d’expression.

L’affaire des caricatures danoises a montré que la censure pouvait venir non seulement de l’autorité civile, mais également de ceux qui sont prêts à tout, jusqu’à détourner l’esprit de la loi, pour faire triompher leur conception totalitaire d’une liberté d’expression bridée par le respect qui serait dû aux expressions de la foi religieuse. Ce qui a conduit à de nombreuses actions intentées pour injure envers une religion devant les tribunaux, notamment français — le délit de blasphème étant comme on l’a dit irrecevable en France.

Par une perversion de sens, la diffamation de la religion est ainsi assimilée aujourd’hui à la diffamation envers les croyants, menant à la confusion avec la discrimination ethnique ou religieuse. La relation entre blasphémateur et l’objet du blasphème, qui était verticale (blasphémateur/Dieu), s’est ainsi horizontalisée, opposant celui qui exerce son droit à la liberté d’expression à l’égard des croyances religieuses et celui qui considère que sa liberté religieuse serait atteinte par ce type d’offense.

Le rétablissement d’un ordre moral se profile ainsi insidieusement, par la voie non politique mais judiciaire — avec quelques succès comme l’interdiction de l’affiche de la Cène détournée de Marithé et François Girbaud, en 2005, cassée toutefois en Cour de Cassation l’année suivante. Cela dit, l’affaire des caricatures a définitivement permis à des groupes de pression de revendiquer ouvertement le rétablissement d’une législation anti-blasphème là où elle n’existe plus, et son application ailleurs. La répression du blasphème montre ainsi la complexité de sa gestion sociale et judiciaire, au coeur de la tension entre liberté de conscience (du diffamateur et du diffamé), liberté d’expression et censure ­— comme si l’on en revenait au temps où Flaubert subissait pour le texte de Madame Bovary les foudres du procureur Pinard.

Jean-Philippe Schreiber (ULB).

 

Orientation bibliographique :

J. Boulègue, Le blasphème en procès, 1984-2009. L’Eglise et la mosquée contre les libertés, Paris, Nova, 2010

P. Dartevelle, Ph. Denis et J. Robyn (dirs.), Blasphèmes et libertés, Paris, Cerf, 1993

 

S’interroger les définitions évolutives du blasphème parmi nos sociétés contemporaines, dans leur rapport aux religions, à la liberté d’expression et à leur droit pénal, c’est nécessairement s’interroger sur leur héritage historique.

Corinne Leveleux entame son excellente étude consacrée à la parole interdite dans la France médiévale (« Du péché au crime »), par un changement capital qui opère vers 1200, alors que le roi de France commence à légiférer sur le blasphème, et que le phénomène blasphématoire entre dans le champ du juridique et donc du politique, en s’émancipant progressivement du religieux.

La justice civile va progressivement s’arroger la répression du délit de blasphème au détriment des tribunaux ecclésiastiques, avec des variations grandissantes dans les peines, le pouvoir temporel se montrant souvent plus inflexible que le pouvoir spirituel et la législation civile plus sévère que la norme canonique. Cela se justifie aussi par le fait que le blasphème est autant perçu comme un acte anti-civique qu’antireligieux, une offense certes faite à Dieu mais en même temps aussi un crime contre l’Etat, ce qui sera caractéristique de la période qui s’ouvre avec la Renaissance.

Plus s’exerce le contrôle social, plus certains comportements sont criminalisés. Perçu comme une provocation et une diffamation, le blasphème a donc des conséquences théologiques ou canoniques, mais aussi judiciaires et sociales : l'incitation à la haine religieuse peut-être considérée, jusqu'à aujourd'hui d'ailleurs, comme un trouble de l'ordre public dans certains Etats.

Parce que la parole blasphématoire est une contestation de l’autorité, une provocation, une forme de subversion, et en ce sens un danger social, elle fut perçue, en particulier à l’époque moderne, comme bouleversant l’ordre établi, comme visant Dieu et le souverain — un souverain investi du pouvoir divin sur terre, garant de l’unité confessionnelle du Royaume, du salut de ses sujets et du respect de la divinité.

Jean Delumeau a cru pouvoir qualifier de « civilisation du blasphème » l'Occident chrétien des XVIe et XVIIe siècles, qui cultive une véritable psychose obsessionnelle en la matière. Casuistes et confesseurs, écrit-il, y jugent unanimement que les deux grands péchés le plus fréquemment commis par leurs contemporains sont la luxure et le blasphème. Progressivement, la culture religieuse post-tridentaire s’est purgée de ce qui dans les traditions populaires, mais aussi dans la culture lettrée colportait de traits de familiarité, de grossièreté, voire d’offense à l’égard de Dieu : moralisation de la société et christianisation de la société iront de pair, et seront marquées par une profusion de textes législatifs qui illustrent en miroir l’inefficacité de la répression.

Si la Réforme a des répercussions fondamentales sur le traitement du blasphème, qui s’apparente de plus en plus à un péché d’hérésie, catholiques et protestants affichent quelquefois des convergences en la matière, comme le montre Alain Cabantous dans son ouvrage magistral sur la question. Ils poursuivent avec non moins de vigueur un péché partagé en leurs terres — Michel Servet fut d’ailleurs deux fois condamné pour blasphème et hérésie, par les catholiques et par les protestants. Tous s’accordent ainsi souvent, au XVIIe siècle encore, pour considérer l’Autre religieux comme fondamentalement blasphémateur, puisque porteur d’une parole qui ne peut qu’aller à l’encontre de la Vérité. C’est ainsi au nom de la répression du blasphème que la Sainte Inquisition romaine fit opérer le brûlement du Talmud en 1553.

Nombre d’auteurs ont montré la différence qui a existé, en réalité de tous temps, entre la volonté du législateur en la matière et l’application de la norme par la machine judiciaire. La fin de l’époque moderne, dans le monde catholique surtout, montre ainsi que l’on réprime peu, que l’on fait davantage preuve de tolérance désormais et que l’on dépénalise progressivement le délit de blasphème. Curieusement, contre toute attente peut-être, la répression est plus forte en pays protestant : ainsi, la Suède réprime sévèrement jusque tard dans l’époque moderne, et appliquera la peine de mort en la matière, bien plus longtemps que d’autres pays d’Europe.

Les jurisconsultes, comme les praticiens du droit, surtout au XVIIIe siècle, ont fait évoluer la définition du blasphème, jusqu’à ce que cette incrimination soit évacuée du code pénal français en 1791 — la loi restauratrice et réactionnaire sur le sacrilège de 1825 ne fut jamais appliquée et abolie cinq ans plus tard — et soit de moins en moins mise en oeuvre dans d’autres pays. Tout au long des siècles, la qualification du crime a ainsi évolué, pour glisser progressivement vers un scandale troublant l’ordre public. Et c’est bien là que réside la vertu réparatrice d’une répression qui s’est voulue exemplaire : faire respecter, vaille que vaille, un ordre social troublé par l’offense faite à Dieu, à la Vierge ou aux Saints.

C’est de plus en plus dans la rhétorique intransigeante d’une Eglise menacée par les libertés modernes que la répression morale du blasphème s’est incarnée, au cœur des représentations les plus fortes des figures du Mal. La parole irrévérencieuse fera ainsi plus que jamais parler le Diable dans l'imaginaire catholique, une parole infernale au service de la Contre-Eglise animée par Satan. L’Eglise, on le sait, a depuis le XIIe siècle construit une sotériologie où la figure répulsive du Diable a occupé une place de plus en plus importante et construit son imagerie du Diable telle qu’elle dominera à partir de la fin du XIVe siècle, un diable qui devient, plus qu’un antagoniste de Dieu, le rival par excellence de celui-ci.

La figure de Satan culmina au XVIIe siècle, avant de refluer avec la fin des guerres de religion, suivant ainsi le cours de la répression du blasphème et ses fluctuations. Elle revient à la fin du XIXe siècle — au moment où la culture catholique regorge à nouveau de surnaturel et où la Révolution française, considérée comme une profanation par le catholicisme intransigeant, est assimilée comme telle au blasphème. Tout comme elle mobilise contre ce qu’elle considère comme une Contre-Eglise, l’Eglise entend réfuter ce qui lui paraît détourné dans son propre lexique : ses adversaires auraient pris à l’Eglise les mots de liberté, de vérité, de vertu… pour les détourner de leur sens — le mensonge, c’est l’inversion du sens de la Vérité, et le blasphème c’est l’exact inverse de la parole sacrée.

Parole interdite, parole transgressive, la parole blasphématoire est une violence symbolique. D’aucuns ont parlé du blasphème comme d’une acclimatation du sacré dans le profane ; peut-être est-ce avant tout une intrusion du profane dans le sacré, une familiarité ou une intimité impossible avec le divin. Alain Cabantous a montré qu’il s’agit, dans le contexte de la première modernité — et la Contre-Réforme l’incarnera le mieux —, d’une immixtion considérée comme intolérable du profane dans le sacré. Elle balise la séparation entre les deux mondes, qui ne peut plus être transgressée — alors qu’avant qu’elle ne fût figée par la Contre-Réforme, la familiarité entre sacré et profane était à vrai dire davantage tolérée.

Parole subversive, la parole blasphématoire demeure une parole, et l’anthropologie de la parole impie est révélatrice à cet égard : pour se laver de ce péché, pour réparer la transgression et rétablir la démarcation entre le profane et le sacré, le blasphémateur est invité à faire pénitence en se mortifiant : il se frappera ainsi la bouche contre le sol ou fera un signe de croix sur la terre avec la langue, de façon à purifier ses lèvres impies. De même, il s’imposera le jeûne comme contrition, la bouche d’où ont été proférées les paroles sacrilèges étant ainsi mise à l’amende.

 Louis IX, qui en 1263 abolit dans le royaume de France la peine de mort pour blasphème, la remplaça par des mutilations pour les récidivistes : percement des lèvres, percement voire tranchage de la langue... En 1727 encore, cinq siècles plus tard, une ordonnance royale punira de la même peine les soldats blasphémateurs, les marquant ainsi dans leur chair. Et rappelons-nous que le bourreau coupa la langue du chevalier de la Barre avant de le décapiter et le brûler avec le texte du Dictionnaire philosophique de Voltaire, la lecture pernicieuse de l’impie jeune chevalier qui eut le triste privilège d'être le dernier condamné à mort pour blasphème en France.

Jean-Philippe Schreiber (ULB).

 

Orientation bibliographique :

A. Cabantous, Histoire du blasphème en Occident, fin XVIe-milieu XIXe siècle, Paris, Albin Michel, 1998

O. Christin, Une révolution symbolique : l'iconoclasme huguenot et la reconstruction catholique, Paris, Éditions de Minuit, 1991

Injures et blasphèmes, Revue Mentalités, n°2, présenté par Jean Delumeau, Paris, Imago, 1989

C. Leveleux, La parole interdite. Le blasphème dans la France médiévale, XIIIe-XVIe siècles ; du péché au crime, Paris, De Boccard, 2001

V. Zuber, Les conflits de la tolérance. Michel Servet entre mémoire et histoire, Paris, Champion, 2004


Nos sociétés sont structurées par des interdits qui sont souvent marqués par l’empreinte du religieux. La caricature, la provocation, voire l’image tout court, sont des formes de contestation de l’autorité qui proclame ces interdits — qu'il s'agisse du dogme religieux ou des institutions religieuses. « Blasphème » est dès lors le mot magique pour désigner l’offense contre ce qui est considéré comme sacré par la religion, loin de son acception littérale et originelle. En réalité, souvent, il s’agit d’autre chose. Les Monthy Python, très intelligemment, avaient ainsi défendu que La Vie de Brian, leur chef-d’oeuvre célèbre pour sa scène finale de crucifixion, interdit durant huit ans en Irlande et demeuré banni durant onze ans en Italie, était hérétique plus que blasphématoire, parce qu’il se moquait des pratiques religieuses plus que de l’idée de Dieu. Ils rejoignaient là ce que Jean-Claude Carrière, son scénariste, avait dit de la même façon de la Voie lactée de Buñuel.

Remontons aux origines. Le Lévitique (XXIV, 11-23) énonce la gravité de l’acte blasphématoire, et sa nature : « Le fils de l'Israélite blasphéma le Nom et le maudit (…).Yahvé parla à Moïse et dit : ‘Fais sortir du camp celui qui a prononcé la malédiction. Tous ceux qui l'ont entendu poseront leurs mains sur sa tête et toute la communauté le lapidera. Puis tu parleras ainsi aux Israélites (…) : Qui blasphème le nom de Yahvé devra mourir, toute la communauté le lapidera. Qu'il soit étranger ou citoyen, il mourra s'il blasphème le Nom’. (…) Moïse ayant ainsi parlé aux Israélites, ils firent sortir du camp celui qui avait prononcé la malédiction et ils le lapidèrent ». « Prononcé » et « maudit » sont ici les éléments essentiels de la rhétorique biblique en matière de blasphème : ils balisent le lien inextricable entre l’énonciation, la malédiction et la sanction de cette « malé-diction ».

Dans la traduction de la Bible hébraïque proposée par Segond, Exode XX, 7 se lit ainsi : « Tu ne prendras [invoqueras] point le nom de l'Éternel, ton Dieu, en vain ; car l'Éternel ne laissera point impuni celui qui prendra son nom en vain ». Ce qui devient le deuxième commandement, dans le catéchisme de l'Eglise catholique, énoncé de la façon suivante : « Son saint nom tu respecteras, fuyant blasphème et faux serment ».

Le blasphème est donc bien, dès l’origine, dans la religion du verbe qu‘est le judéo-christianisme, une parole, une parole énoncée avant d’être une parole réprimée. Cette parole énoncée est un acte langagier. Mais proférer des paroles interdites est un acte d’une gravité extrême : le nom — ineffable, dira-t-on plus tard — de Dieu ne se prononce pas, formule le Décalogue ; le blasphème, au sens premier, est donc un acte fondamentalement hérétique, puisqu’il est l’inverse parfait de la Sanctification du Nom.

D’emblée apparaît ainsi une tension entre le caractère courant et banal de cet acte langagier et la rhétorique du discours religieux, qui en fait un délit, un « crime de lèse-majesté divine », et le criminalise. L’observateur de l’histoire des pratiques sociales dans nos sociétés européennes, ne doit pourtant pas se laisser abuser par la rigueur de cette rhétorique : l’acte langagier demeure ce qu’il est, par lui-même, intentionnel ou non intentionnel, injuriant volontairement ou involontairement la religion, et ne constituant pour autant pas un blasphème, qui n’existe que par son assimilation à un péché et sa punition — puisqu’il n’est de blasphème que par la répression de la « parole impie ». Et en vérité, il y eut des variations en la matière : le blasphème ne fut pas toujours considéré comme un délit spirituel, parfois seulement comme une infraction langagière.

C’est dire qu’il s’agit là d’une question complexe, entre le prescrit de la loi religieuse et les usages sociaux de la parole impie. Elle ouvre plusieurs champs de recherche, de l’anthropologie à l’histoire de la justice criminelle, de la sociolinguistique à l’étude des religions populaires et des mentalités. Mais elle est aussi une plongée au plus intime de la religion et de ses dogmes fondamentaux, puisque le blasphème est à l’origine même du christianisme, dans la parole supposée blasphématoire du Christ en personne, qui le conduira à la Croix. Elle est enfin un bon indicateur de la place de la religion dans l’espace public et dans la culture : un baromètre en creux du degré de religiosité, de l’intensité du sentiment religieux, de la nature du sacré et des cadres de la permissivité religieuse.

Pour autant, la chose n’est pas simple : parce que le blasphème « désigne des outrances verbales d'inégale portée » et qu'il n’est pas une catégorie figée : celle-ci fut et demeure plastique, tributaire des changements de perception que les sociétés en eurent. De plus, on ne peut se laisser abuser par un terme qui n’est que le reflet de ce que l'Institution religieuse a dessiné comme frontière entre le licite et l’illicite. Il faut donc rendre compte de cette dynamique, sans être l’otage du sens premier donné au terme, et s’interroger sur les usages de ce sens, qui sont divers : le blasphème, au sens théologique littéral, n’est pas l’injure, l’exécration ou l’imprécation ; et ses contours sont fragiles dès lors que l’on veut définir ce qui n’est qu’un aspect d’un ensemble plus vaste, le sacrilège.

Cette notion fluctuante, quant à son acception, est liée aux dogmes que le blasphème protège. Comme l’écrivait Voltaire dans son Dictionnaire philosophique, à l’entrée « Blasphème » : « … ce qui fut blasphème dans un pays fut souvent piété dans un autre (…) Il est triste parmi nous que ce qui est blasphème à Rome, à Notre Dame de Lorette, dans l’enceinte des chanoines de San Gennaro, soit piété dans Londres, dans Amsterdam, dans Stockholm, dans Berlin, dans Copenhague, dans Berne, dans Bâle, dans Hambourg ».

Le Blasphemy Act de 1698, dans l’Angleterre de la Royal Society, de Hobbes, Locke et Toland, assimila le blasphème à l’incroyance en visant ceux qui proclamaient la fausseté de la religion chrétienne ou mettaient en question l’inspiration divine de la Bible. Mais l’athée ne blasphème pas, puisqu’il ne reconnaît pas Dieu : il provoque le croyant. Le blasphème n’est donc pas un indicateur fiable du développement de l’athéisme à l’époque moderne, seuls les croyants blasphémant formellement — Pierre Bayle, qui jouera un rôle déterminant dans l’évolution de la notion, le rappelait au XVIIe siècle déjà quand il écrivait que le blasphème n’est scandaleux qu’aux yeux de celui qui vénère la réalité blasphémée. Et Marguerite Yourcenar fera dire au Prieur, dans L’Oeuvre au Noir : « Pendant combien de nuits ai-je repoussé l’idée que Dieu n’est au-dessus de nous qu’un tyran ou qu’un monarque incapable, et que l’athée qui le nie est le seul homme qui ne blasphème pas ».

Jean-Philippe Schreiber (ULB).

 

Mercredi 2 mars 2011, après avoir quitté son domicile d’Islamabad, Shahbaz Bhatti, ministre des Minorités religieuses, seul membre chrétien du gouvernement pakistanais, était assassiné par les talibans du Pendjab. Après la mort du gouverneur du Pendjab Taseer quelques semaines plus tôt, il s’agissait du second attentat visant une personnalité engagée contre la loi punissant de mort le blasphème dans la République islamique du Pakistan.

Il n’est toutefois pas qu’au Pakistan que la loi défend Dieu et ses adeptes de toute atteinte aux dogmes religieux ; la législation de plusieurs démocraties libérales la prévoit aussi, montrant la persistance de l’imprégnation d’interdits religieux au cœur de nos système juridiques. Plus encore, dans des pays vivant sous le joug de la loi religieuse, mais également dans nos démocraties libérales, le « religieusement correct » revient en force aujourd’hui et contribue à brider la liberté d’expression.

L’épisode douloureux de la crise des caricatures danoises, en 2005-2006, a montré à la fois la force politique virulente des images et l’impact que leur poids symbolique pouvait avoir en matière de dialogue comme d’incompréhension entre les cultures, tout autant que de conséquences sur les relations internationales. Elle a ainsi ramené sur le devant de la scène la question du blasphème et réveillé les interrogations sur la licéité de discours et d’images manifestant de l’irrespect à l’égard des religions, fût-ce sur le mode satirique et non sur celui du sacrilège, sacrilège que Voltaire, pourtant ardent pourfendeur de la punition du blasphème, dénonçait sans ambages. Bien que Voltaire n’ait jamais écrit la phrase célèbre « Je hais vos idées mais je me battrai jusqu’au bout pour que vous puissiez les exprimer », il ne fait aucun doute que pour le chantre de la tolérance et le défenseur du chevalier de La Barre, l’interdiction du blasphème enfreignait la liberté d’expression.

La censure n’est pas seulement l’apanage du pouvoir, mais également de groupes de pression qui mettent tout en œuvre, jusqu’au détournement de l’esprit de la loi, pour faire triompher leur conception totalitaire d’une liberté d’expression bridée par le respect qui serait dû aux expressions de la foi religieuse. Entre 1984 et 2009, pas moins de vingt procès ont ainsi été intentés devant des tribunaux français pour injure ou diffamation envers une religion. Et ce quand il ne s’agit pas d’une assimilation pour le moins perverse entre l’hostilité à l’égard de certaines idées, religieuses en l’occurrence, et la xénophobie : c’est en tout cas ainsi qu’il faut lire de nombreuses interprétations de l’épisode des caricatures qui, sont dénier le droit à la liberté d’expression, y voient une forme ultime de mépris à l’égard de l’Autre religieux, et en font ainsi un produit détourné de ce que l’air du temps désigne de plus en plus souvent sous le vocable d’islamophobie.

L'Organisation de la Conférence islamique et la Ligue arabe avaient ainsi fait part, au lendemain de l’affaire des caricatures, de leur volonté de saisir l'Organisation des Nations Unies pour obtenir une résolution contraignante, interdisant le mépris des religions et prévoyant des sanctions contre les pays ou les institutions qui enfreindraient cette résolution. Le célèbre dessinateur français Plantu, avait déclaré dans ce contexte : « Il y a de plus en plus une chape de plomb qui tombe sur les dessinateurs de presse et sur les humoristes, quand on parle de religion. On ne se rend pas compte à quel point, hormis l'Eglise catholique sur laquelle on peut taper et qui fait preuve, quoi qu'on en dise, de mansuétude, il est devenu impossible de critiquer les religieux. ».

C’est le même Plantu, preuve de ce que le religieusement correct s’impose définitivement quand il parvient à prendre la création en otage, qui trois ans plus tard devra concéder s’intéresser désormais en priorité au débat social et économique. A la question “Avez-vous peur de caricaturer les religieux tels que les prophètes ?” Plantu a répondu : “Je ne veux pas humilier les croyants ! A Paris, je ne risque rien ! Vous non plus ! Ce qui m’importe c’est dessiner les “terrestres”, les religieux et ce qui se passe au dessus des nuages ce n’est pas la priorité !”. La violence, physique ou symbolique, a ainsi gagné ce que la liberté d’expression et la création ont perdu… A contre-courant de ce que l’après mai-1968 avait osé moquer, parfois jusqu’à l’excès, le politiquement correct — tout autant que le religieusement correct — revient ainsi en force aujourd’hui et contribue à singulièrement brider la liberté d’expression.

Nos sociétés sont structurées par des interdits qui sont souvent marqués par l’empreinte du religieux. Notre culture est riche de figures diverses et variées du blasphème, qui n’empruntent au terme que ce qu’il implique de domination : domination imposée par le rigorisme religieux, et qui s’est traduite en droit en sécularisant une catégorie religieuse. Il n’est qu’au regard de la religion, et de ce qu’elle vénère, que l’on blasphème ; si l’on se place d’un autre point de vue, il ne s’agira que de provocation, au pire de mauvais goût ou d’outrage aux bonnes mœurs. Pour évoquer tout outrage envers la divinité et, par extension, toute forme d’irrévérence envers ce qui fait l’objet d’une vénération religieuse, nous ne disposons en effet que de termes connotés : « blasphème » ou « sacrilège » ont été empruntés au vocabulaire religieux et sécularisés, à défaut de termes séculiers qui rendraient compte de ce que les religions jugent comme blasphématoire ou sacrilège. La provocation est alors quelquefois le passage obligé pour dénoncer avec force la violence totalitaire d’un dogme qui voudrait s’imposer à tous. C’est ainsi qu’il faut lire, sans doute, les figures du blasphème qui ont traversé notre culture, de Molière, Voltaire et Sade à Warhol, en passant par Jean Richepin – l’auteur des Blasphèmes – et, plus près de nous Carl Einstein, Nikos Kazantzakis, Roberto Rossellini, Salman Rushdie ou Günther Grass.

Questionner le blasphème, c’est considérer qu’aucun objet du savoir ne peut être considéré comme suffisamment sacré pour se dérober à une investigation critique, et refuser de brider la liberté d’expression : l’investigation scientifique défend l’idée que les opinions doivent s’exprimer librement, pour autant que cette libre expression réponde aux conditions d’un débat équilibré, qu’elle ne soit pas la négation de la liberté et qu’enfin elle respecte les individus. Professer ceci, c’est professer le respect et la tolérance à l’égard des individus, quand bien même manifestent-ils une religion ou une croyance peu respectable. En revanche, pour autant que l’on vise les idées religieuses et non les individus, l’irrévérence anti-religieuse entre dans le champ de la liberté d’expression, parce que les religions ne méritent pas de respect plus marqué que toute idée ou conviction, et que rien n’est sacré sinon la personne humaine. C’est la perspective du présent dossier.

Car les idées, fussent-elles sacralisées par certains, voire même figées en dogmes, ne sont après tout que des idées, et que rien ne peut nous empêcher ni d’en chanter les louanges, ni de les mépriser ou de les tourner en ridicule. On ne diffame que les personnes, pas ce qu’elles pensent ou révèrent. Henri Pena-Ruiz l’a bien résumé : « La libre critique peut aller jusqu’à la satire ou à la dérision, lesquelles ne visent pas les personnes comme telles, mais des croyances et des idéologies qu’aucun principe d’autorité ne doit soustraire au jugement ». Certes, voilà une chose qu’il est difficile de revendiquer aujourd’hui, alors même que ceux que l’on accuse de blasphème sont non seulement l’objet de poursuites judiciaires, mais quelquefois menacés de violences ou de mort. C’est alors un devoir de rappeler au nécessaire et impérieux devoir qu’est la liberté d’expression. 

Jean-Philippe Schreiber (ULB).

lundi, 26 décembre 2011 15:10

Voeux 2012

 

orela-02

Toute l'équipe ORELA vous souhaite une très belle année 2012 !

The ORELA team wishes you a verry happy New Year !

dimanche, 25 décembre 2011 15:16

Revue de presse hebdo, 24 décembre

North Korea

North Korea’s Persecution Of Christians Expected To Continue After Kim Jong II’s Death. North Korea told the UN Human Rights Commission in 2002 that 15,000 of its 24 million citizens are Christians, but the Pew Forum on Monday released a report estimating that there are 480,000 Christians in North Korea, a country known for its persecution of Christians. Analysts discuss the possibility of more religious tolerance under the rule of Kim Jong II’s successor (Jaweed Kaleem, Huffington Post)

USA

Angels: Nearly 8 In 10 Americans Believe These Ethereal Beings Are Real. An Associated Press-GfK poll conducted 8-12 Dec. shows that 77% of American adults (and even a majority of non-Christians) believe in angels (Jennifer Agiesta, Associated Press/Huffington Post)

UE

La proposition de loi visant à interdire l’abattage rituel juif et musulman aux Pays-Bas, massivement approuvée en juin dernier par l'assemblée nationale, vient d'être bloquée par le Sénat. Ailleurs en Europe, du Front National à la Ligue du Nord, le thème de la souffrance animale est instrumentalisé par les partis populistes et d'extrême droite — Abattage rituel et défense des animaux profitent aux populistes (Marco Bertolini, MyEurop.info)

Italie

L’Italie aux mains des « banquiers de Dieu » : une interview d’Anne Morelli, professeur à l’ULB, directrice du Centre interdisciplinaire d’étude des religions et de la laïcité (CIERL), pour laquelle les membres du nouveau gouvernement italien sont les tenants d’un catholicisme extrêmement traditionnel (Ricardo Gutierrez, Le Soir du 21.12.2011).

Le Vatican, qui ne paye aucun impôt, se dit prêt à apporter son obole à l'Etat italien pour rembourser sa dette — Les milliards du Vatican intéressent l'Italie ruinée (Ariel Dumont, MyEurop.info)

France

Malgré les hésitations de la mairie, pour la première fois, une crèche a été installée sur le marché de Noël des Champs-Élysées à Paris : les catholiques se mobilisent pour redonner à la Nativité son sens chrétien — La crèche de Noël embarrasse la laïcité (François-Xavier Maigre, La Croix)

Belgique

Un gynécologue devra payer 100.000 euros de dédommagements aux parents d'un enfant handicapé parce qu'il les avait avertis trop tard du handicap de leur fille, les empêchant de procéder à un éventuel avortement — Avortement : la loi remise en question (Le Vif, avec Belga)

On a appris lors de la dernière assemblée générale du Conseil interdiocésain des laïcs (CIL), sorte de parlement officieux de la base catholique de Wallonie et de Bruxelles, que la Conférence épiscopale allait réduire drastiquement son subside. Le Conseil ne recevra de fait plus que 50 % de ce que la hiérarchie ecclésiale lui attribuait et cela entravera sérieusement son fonctionnement. Manifestement, une frange de la hiérarchie n’appréciait que très peu les positions critiques du CIL, qui avait présenté le fruit de plusieurs années de réflexions approfondies et de consultations tous azimuts sous la forme de "dix pistes utiles" pour l’Eglise de Belgique — L’Eglise veut-elle étouffer l’expression de sa base ? (Christian Laporte, La Libre Belgique)

Judaism

The Truth(s) About Hanukkah. Shawna Dolansky reflects on the different meanings of celebrating Hanukkah, comparing the four Maccabees books of the Christian Bible (not belonging to the Jewish canon) to what the Talmud tells about Hanukkah and the Maccabees, to conclude that what Jews today celebrate is probably a 20th Century version, strongly influenced by Zionism and Christianism (Shawna Dolansky, Huffington Post)

Opinions

Tant annoncé, redouté ou attendu, le retour du religieux recouvre une réalité aux contours et aux implications complexes et souvent mal connus dans notre société laïque. Le philosophe Guy Haarscher se fait le défenseur d’une conception politique de la laïcité. Il n’évacue pas la possibilité d’une spiritualité individuelle,  mais met en garde contre les glissements et les dérives d’une religiosité imposée — L’invité(e) : « Il faut poser les enjeux du retour du religieux » (Nicolas Bogaerts, Psychologies Magazine)

Culture

Journaliste et écrivain, directeur de radio, Salomon Malka est spécialiste de l’histoire du judaïsme et l’auteur de nombreux ouvrages dont un Jésus rendu aux siens, des essais biographiques sur Emmanuel Lévinas, Franz Rosenzweig, Vassili Grossman… Dans son Dictionnaire intime de la Bible (Armand Colin), il nous convie à une promenade biblique au gré de ses goûts, de ses lectures, de ses rencontres. Le même éditeur publie Jésus, l'héritier. Histoire d'un métissage culturel de Christian Elleboode, qui enseigne à la Faculté catholique de Lille.

samedi, 17 décembre 2011 08:41

Revue de presse hebdo, 17 décembre

International

“The Istanbul Process”: Hillary Clinton Hosts Summit On Religious Intolerance. Representatives from more than 30 countries joined US Secretary of State Hillary Clinton to explore how to combat religious intolerance, by protecting the right to practice one’s religion freely and the right to express one’s opinion without fear (Joseph Kuhn, Huffington Post)

En Egypte, en Tunisie, au Maroc, les islamistes arrivent ou sont arrivés au pouvoir. Sont-ils porteurs de changements économiques ? Quels sont leurs programmes et à quoi s'attendent les investisseurs ? De l'ouest à l'est, le rôle et les marges de manoeuvre des islamistes sont assez différents — Les islamistes jouent leur crédibilité sur l'enjeu économique (Un dossier de Benjamin Barthe, Florence Beaugé et Anne Rodier dans Le Monde)

Les autorités américaines estiment qu'une banque libanaise est au centre d'un circuit complexe de blanchiment d'argent et de trafics de drogue qui profiteraient au grroupe radical islamiste Hezbollah — Le Hezbollah et les cartels de la drogue travailleraient main dans la main (Quentin Girard, Libération)

USA

Jon Stewart: TLC’s ‘All-American Muslims’ Not Stereotypical Enough For Florida Family Association. Jon Stewart, one of America’s most popular comedians, blames companies like Lowe for withdrawing their ads from the “All-American Muslim” TV reality series, because according to Lowe the series depicts American Muslims as being first of all ordinary Americans, instead of terrorism supporting extremists (Katia McGlinn, Huffington Post)

Occupy Group faults Church, a Onetime Ally. In the weeks since Occupy Wall Street was evicted from Zuccotti Park in Lower Manhattan, relations between the demonstrators and Trinity Wall Street, a church barely one block from the New York Stock Exchange, have reached a crossroads (Matt Flegenheimer, The New York Times)

Belgique

Des islamistes du groupuscule Sharia4Belgium ont diffusé une vidéo sur internet où on peut les voir poser dans l'enceinte du palais royal de Laeken en tenue de moudjahidins avec un drapeau d'Al-Qaïda, lit-on samedi dans les journaux du groupe Sud Presse — Les islamistes de Sharia4Belgium diffusent une vidéo provocatrice (Belga, La Libre Belgique)

Eglise catholique

'Celibaat is historische fout' : Ererector KU Leuven Roger Dillemans (79) kastijdt de kerk. L'ancien recteur de la Katholieke Universiteit Leuven considère comme une erreur le fait de ne pas avoir accordé le droit à la prêtrise aux femmes et aux hommes mariés (Filip Rogiers, De Standaard)

La commission d'enquête indépendante mise sur pied par la conférence des évêques et la conférence religieuse néerlandaise en 2010, a dénoncé la culture du silence des autorités religieuses vendredi 17 décembre, après avoir révélé que plusieurs milliers d'enfants avaient été victimes d'abus sexuels au sein de l'Eglise catholique aux Pays-Bas depuis 1945 — Pédophilie : l'Eglise catholique néerlandaise visée à son tour (Le Monde)

    Culture

    Christopher Hitchens Dead: Legendary Writer Dies At 62. On Friday Hitchens died. He was an outspoken ‘antitheist’ supporting the idea that organized religion is the main source of hatred and tyranny in the world. He also was part of the Foreign Policy and Prospect Magazines’ “Top 100 Public Intellectuals” (Jade Walker, Huffington Post)

    samedi, 10 décembre 2011 09:39

    Revue de presse hebdo, 10 décembre

    Union européenne

    La Commission des Episcopats européens (COMECE) appelle, au nom de considérations éthiques, l’UE à exclure la recherche sur les  embryonnaires humaines de son prochain programme cadre de financement de la recherche Horizon 2020 et de se concentrer plutôt sur le secteur plus innovant et prometteur de la recherche sur les  alternatives — Cellules souches : la Comece demande à l’UE d’actualiser sa politique (Catho.be)

    USA

    Newt Gingrich"s Catholic Conversion Is Part Of A Larger Spiritual Shift In His Life And Politics. After Herman Cain recently left the GOP presidential primaries because of sexual harassment accusations, Newt Gingrich became the new GOP frontrunner. His main rival is Mitt Romney, but polls show that white Evangelicals, which are the biggest part of the GOP base, tend to be more attracted to Catholics than to Mormons, considering Mormonism to be a cult and not a Christian religion. (Jaweed Kaleem, Huffington Post)

    Gulnare Free Will Baptist Church Revisits Interracial Couple Ban After Uproar.  After Kentucky church members voted to bar mixed-race couples from joining the congregration, they’ve received a firestorm of criticism, which has finally led them to reconsider their decision. (Dylan Lovan, Associated Press/Huffington Post)

    Israël

    Israelis, Resentful Of Orthodox Grip On Society, Fight Back. Even if the ultra-orthodox Haredi only make up 8% of the Israeli population, their influence has been growing during the last decade. From banning women from public busses to closing contemporary dance schools, Haredi Jews succeed more than ever to impose their own religious standards on the rest of society. But today, Israelis start to stand up against these practices and try to make the law less extremist. (Michele Chablin, Huffington Post)

    France

    L'institut Civitas, animé par le militant intégriste catholique Alain Escada, a appelé à des manifestations contre la pièce Golgota Picnic. Eclairage sur un mouvement chrétien qui fait de plus en plus parler de lui — Civitas, ce mouvement chrétien sorti de l'ombre (Caroline BruneauJulien Licourt, Le Figaro)

    Belgique

    Le pouvoir organisateur de la Katholieke Universiteit Leuven (KUL), s'interroge sur le maintien du K dans sa dénomination, et ne conserve l’archevêque de Malines-Bruxelles comme membre en son sein, en sa qualité de Grand chancelier, qu’à titre honorifique. Le poste de président reviendra désormais à un laïc — Mgr Léonard chancelier honorifique (La Libre Belgique)

    Allemagne

    Le tribunal administratif fédéral de Leipzig a refusé mercredi, en dernière instance, à un lycéen musulman le droit de faire sa prière à l'école. Le jugement du tribunal de Leipzig, qui fera jurisprudence, était très attendu outre Rhin — La justice allemande bannit la prière à l'école (Patrick Saint-Paul, Le Figaro)

    Islam

    L'intellectuel palestinien Khaled Hroub s'interroge : les pays qui ont fait la révolution pour se débarrasser de la dictature policière risquent-ils maintenant de tomber dans la tyrannie religieuse ? Ce n'est ni une question de polémique abstraite ni une condamnation a priori des islamistes, avant même qu'ils aient pu arriver au pouvoir. Il s'agit au contraire d'exprimer une crainte réelle et légitime, écrit-il — Ces dirigeants qui se croient élus par Dieu (Al-Hayat repris par Le Courrier international)

    Vatican

    Le Saint-Siège est devenu Etat membre de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), pour permettre à son réseau très actif sur ce front de travailler plus étroitement avec cette organisation intergouvernementale, a annoncé Radio Vatican — Le Saint-Siège, Etat membre de l'OIM (Europe I)

    Opinions

    Nos sociétés n'ont pas assez de "sans-Dieu" : "Nous sommes menés par des croyants, c'est-à-dire par des infirmes mentaux, des gens qui croient fermement à des billevesées honteuses de puérilité et qui décident du sort des Etats. Il est des pays où le blasphème est un crime. Il est des pays où l'on ne rit pas, ou alors, du bout des dents" — une opinion de l'écrivain et dessinateur Cavanna (Le Monde)

    D'un côté, ceux qui sont affectés dans leur croyance usent du terme "blasphème" pour marquer leur indignation et condamner l'expression artistique offensant le divin ; de l'autre, pour ceux qui défendent la liberté d'expression, le terme "blasphème" résonne comme un mot repoussoir, caduc, qui signifie le retour d'un ordre religieux et moral menaçant le modèle laïque. Pour Olivier Bobineau, sociologue des religions, le recours au terme "blasphème" est plutôt le signe paradoxal de bonne santé démocratique et laïque, qui atteste d'une société sécularisée — Retour de l'ordre religieux ou signe de bonne santé de notre pluralisme laïque ? (Le Monde)

    Culture

    Curieuse alliance entre intégristes et marchands d'"art islamique" : Mandanjeet Singh, ambassadeur de bonne volonté à l'Unesco et fondateur de la South Asia Foundation, s'exprime sur les remous autour de la notion d'art islamique, les trafics afférants et l'auto-censure de certains musées (Le Monde)

    De la grande déesse à la vierge en majesté, par Anne Gersten, publié par l'Académie royale de Belgique : une tentative de synthèse de la longue histoire des métamorphoses de la Grande Déesse des origines, qui, en passant par les polythéismes des religions antiques et le monothéisme juif, jusqu'à l'avènement du christianisme, aboutit à la figure de la Vierge Marie

    Le goût de l'excellence. Quatre siècles d'éducation jésuite en France : un livre de Philippe Rocher, paru aux éditions Beauchesne

    vendredi, 02 décembre 2011 17:48

    Revue de presse hebdo, 3 décembre

    Union européenne

    Une plainte des associations humanistes et laïques européennes auprès du Médiateur européen met en lumière l'influence des lobbies religieux au sein de la Commission européenne. Ils bloquent des directives, créant des conflits de droit entre la législation européenne et des pratiques discriminatoires d'institutions religieuses. Ainsi, malgré la présence de lois interdisant les discriminations à l'embauche, certaines Eglises prétendent en être exemptées au nom de la liberté de religion — Lobbies religieux : la Commission doit se confesser (Myeurop.info, Photo : Francisco Ferrer Guardia, libre-penseur espagnol, 1859-1909)

    France

    L'école hôtelière de Dosnon, dirigée par un membre de l'Opus Dei, est au coeur d'un procès qui s'est tenu en septembre, et dont le jugement vient d'être rendu. Ils étaient trois de l'Opus Dei à être poursuivis pour "travail dissimulé" et "rétribution contraire à la dignité". Ils ont été relaxés. Le parquet, qui avait requis de lourdes amendes à leur encontre, a fait appel — Une école dans la main de l'Opus Dei (Bérénice Rocfort-Giovanni, Le Nouvel Observateur)

    Egypte

    Selon les estimations avancées par la presse, les Frères musulmans, qui sont pour la première fois en lice sous l'étiquette d'un parti politique légal, ont déjà revendiqué plus de 40% des voix dans ce scrutin marqué par une mobilisation inédite dans le pays. Ils sont suivis par le parti salafiste Al-Nour, fondé à Alexandrie après le soulèvement populaire de janvier-février qui a renversé Hosni Moubarak, et qui obtiendrait plus de 20% des voix dans cette première étape de législatives prévues sur quatre mois — Egypte : percée surprise des salafistes, derrière les Frères musulmans (AFP et Libération)

    USA

    Interracial Couple Banned From Kentucky Church. Last week Melvin Thompson, former pastor of the Gulnare Freewill Baptist Church in Kentucky, proposed to ban interracial couples from his church. A majority voted for the ban (Huffington Post)

    ‘All-American Muslim’ Is As American As Apple Dessert. Debbie Almontaser discusses the new American reality TV series called ‘All-American Muslims’, which is exceptional not only because this is the first reality TV series about American Muslims, but also because it’s one of the rare reality TV shows not focused on sensationalism but rather on everyday problems all Americans can relate to (Debbie Almontaser, Huffington Post)

    Culture

    Massacre At Jerusalem. Do The Crusades Still Matter? Jay Rubinstein, professor of Medieval History at the University of Tennessee and author of a monography about Guibert of Nogent, one of the first medieval historians of the Crusades, tries to determine what lesson we should draw today from the First Crusade and the slaughtering of Muslims living in Jerusalem during the massacre of 1099 (Jay Rubinstein, Huffington Post)

    Il y a dix ans, oser parler de Dieu dans un concert risquait à son auteur d'être immédiatement relégué au rang d'animateurs à vie des JMJ, ou, pire, estampillé du label "pop-louange" et envoyé illico au Festival Holywins à Jarnac. Aujourd'hui, parler de sa foi est à la mode — Les cathos sont branchés (Marie Vaton, Le Nouvel Observateur)


    dimanche, 27 novembre 2011 09:14

    Revue de presse hebdo, 26 novembre

    USA

    Obama Thanksgiving Address: Multiple Conservatives Upset By Lack Of God Mention. When on Thursday president Obama addressed the Nation to talk about Thanksgiving, he didn’t mention the name of God, which made multiple conservative columnists react, some going as far as blaming him of being a “militant atheist”, notwithstanding the fact that the president is a Christian (The Huffington Post)

    A Christian Gives Thanks That America Is Not A Christian Nation.  As a Christian and Quaker, Parker J. Palmer strongly supports the idea of a democracy that separates Church and State and where diversity is seen as one of its most precious assets, instead of something that should be eliminated. So on Thanksgiving, he decided to be thankful for America’s rich religious diversity (Parker J. Palmer, The Huffington Post)

    As Pew Research Center (Washington), the number of organizations engaged in religious lobbying or religion-related advocacy in Washington, D.C., has increased roughly fivefold in the past four decades, from fewer than 40 in 1970 to more than 200 today — Lobbying for the Faithful. Religious Advocacy Groups in Washington, D.C. (Pew Research Center)

    Les adeptes de l'Eglise de Jésus-Christ des saints des derniers jours travaillent leur image de marque — Des mormons si branchés (Bérangère Cagnat, Le Courrier international)

    Le millionnaire Todd Stiefel a investi une bonne partie de sa fortune dans la constitution d'un lobby bien organisé et de plus en plus remuant, qui défend à Washington la cause des athées, des agnostiques et des humanistes. Selon lui, les non-croyants ont désormais un groupe de défense qui  sera « le prochain grand mouvement pour les droits civiques aux Etats-Unis », après ceux des femmes, des Noirs ou des homosexuels — Impies soient-ils Etats-Unis (Lorraine Millot, Libération)

    France

    François Hollande, candidat PS à la présidentielle, a déclaré devant le Grand Orient de France, lequel l'avait invité rue Cadet à Paris, qu’il envisageait l‘intégration dans la Constitution de la Séparation de l’Église et de l’État — Au GODF, Hollande prône l’intégration de la laïcité dans la Constitution (L'Express)

    Pologne

    Le gouvernement a rejeté la demande de l’Eglise catholique, qui suggérait que les citoyens qui le souhaitent, puissent allouer 1% supplémentaire de l’impôt sur le revenu aux Eglises, estimant que le budget de l’Etat ne le permettait pas — Pologne : Pas de pourcentage supplémentaire pour les Eglises (Catho.be)

    Québec

    Le gouvernement Charest préparerait une directive pour interdire la religion dans les services de garde en milieu familial, comme il l'a fait dans les centres de la petite enfance et les garderies subventionnées  — Services de garde en milieu familial: Québec songe à interdire la religion (Pascale Breton, La Presse)

    Vatican

    Le cardinal Tarcisio Bertone, secrétaire d'Etat et numéro deux du Vatican, a critiqué, mardi 22 novembre, l'existence d'un "laïcisme intolérant" en "conflit ouvert avec les valeurs chrétiennes traditionnelles", et ce devant le Conseil des conférences épiscopales d'Europe — Le numéro deux du Vatican dénonce une laïcité "intolérante" (AFP et Le Monde)

    Protestantisme évangélique

    Le Conseil national des évangéliques de France (Cnef) vient de publier « L’Engagement du Cap », texte d’orientation voté lors de la troisième édition du Congrès de Lausanne pour l’évangélisation du monde lancé en 1974 par le célèbre prédicateur évangélique Billy Graham — La feuille de route des leaders évangéliques du monde entier vient de paraître (C.H., La Croix)

    Culture

    ‘Rembrandt and the face of Jesus’: DIA Show Explores Radical Religious Paintings. The Detroit Institute of Arts’ show ‘Rembrandt and the face of Jesus’ opens on Sunday, and focuses on the issue of how Rembrandt’s images of Jesus were a bold departure from the traditional renderings of Jesus by Western artists, amongst others by making Jesus look more Jewish than ever before. (Kate Abbey-Lambertz, The Huffington Post)

    Une sélection de quinze images jugées blasphématoires qui ont choqué ces dernières années : l'écrasante majorité de ces scandales sont liés à l'Eglise catholique — Quinze images qui ont choqué Dieu (Soren Seelow, Le Monde)

    Les images blasphématoires : une interview du dominicain, spécialiste d'iconographie chrétienne, François Bœspflug — A la fin du XIXe siècle, Paris était la capitale mondiale de la caricature religieuse (Soren Seelow, Le Monde)

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