Sur les pourtours musulmans de la Méditerranée, on assiste à un redéploiement des organisations « Frères musulmans », dont les récents succès électoraux, surtout depuis le Printemps arabe, poussent à reconsidérer leur place dans le monde arabe comme force politique de premier ordre. Cette dynamique est également observable en Europe où les Frères musulmans européens (FME), via la Fédération des Organisations islamiques en Europe (FOIE) — dont le siège est à Bruxelles —, sont également des acteurs importants, voire cardinaux du paysage islamique européen. Preuve de ce dynamisme, les FME organisent chaque année les deux manifestations musulmanes les plus importantes du monde occidental, en banlieue parisienne (au Bourget, au printemps) et à Bruxelles (en septembre), attirant des dizaines de milliers de personnes. Pour autant, ce dynamisme ne doit pas masquer les crises profondes dans lesquelles sont actuellement plongés les Frères musulmans.
Le 27 avril, le pape François a célébré la canonisation de Jean XXIII et Jean-Paul II. Le sens de cette double canonisation n’est pas sans intérêt pour les historiens de l’Église contemporaine. En effet, Jean XXIII est le pape de Vatican II, un pape qu’on voulait « de transition » et qui est pourtant passé à l’histoire pour avoir voulu renouveler le catholicisme. L’interprétation de l’aggiornamento est cependant une question qui – cinquante ans plus tard – fait encore débat chez les théologiens. Le fait que le pape François ait canonisé l’homme du concile en même temps que Jean-Paul II (pape charismatique, mais pas vraiment progressiste) pose question. Quelle direction le renouvellement du catholicisme est-il en train de suivre ?
C’était le mercredi 2 mars 2011. Après avoir quitté son domicile d’Islamabad, Shahbaz Bhatti, ministre des Minorités religieuses, seul membre chrétien du gouvernement pakistanais, était assassiné par les talibans du Pendjab. Après la mort du gouverneur du Pendjab Taseer quelques semaines plus tôt, il s’agissait du second attentat visant une personnalité engagée contre l’application de la loi punissant de mort le blasphème dans la République islamique du Pakistan. Trois ans plus tard, en mars dernier, le rapport de la Commission américaine sur la liberté religieuse disait craindre que l’augmentation des lois bannissant le blasphème ne conduise à punir des personnes qui ne feraient qu’exprimer des différences de vues religieuses, le Pakistan étant de loin le pays qui emprisonne le plus de citoyens soupçonnés de porter atteinte à la religion, selon ce rapport. « Cette tendance à recourir de plus en plus aux lois anti-blasphème va certainement conduire à une hausse des violations des libertés de religion et d’expression », a indiqué Knox Thames, l’un des responsables de cette commission.
L’organe représentatif du culte islamique vient d’être renouvelé ; sa nouvelle composition a été présentée ce 30 mars, au terme d’un processus de sélection organisé au sein des mosquées. Alors que les élections des équipes précédentes avaient été ouvertes à tous les musulmans de Belgique et avaient reçu une large attention médiatique, cette fois le processus s’est accompli dans la discrétion. Le nouvel Exécutif sera-t-il à même de stabiliser la représentation du culte islamique et de fonctionner plus efficacement que ses prédécesseurs ?
A suivre les commentateurs, la réforme de la Curie romaine est un des enjeux du pontificat de François. Elu pour réformer, le pape engage les réformes : groupe de cardinaux pour le conseiller dans le gouvernement de l’Eglise (13 avril 2013), Commission d’étude et de proposition chargée de l’organisation de la structure économique et administrative du Saint Siège (18 juillet 2013), Secrétariat pour l’économie (24 février 2014). Mais faut-il souscrire entièrement à cette analyse, renvoyant à nombre de représentations du Vatican – administration bloquée, opacité tenace, jeux de couloirs, inefficacité récurrente ? Une mise en perspective socio-historique nuance en effet assez largement ces lectures.
L’Eglise orthodoxe a décidé au début des années soixante d’organiser la tenue d’un concile panorthodoxe afin de régler un certain nombre de problèmes qui se posent à l’intérieur de la communion. Mais le monde a changé depuis lors. La chute du communisme a recomposé le paysage religieux en Europe orientale et dans les Balkans. Les enjeux de ce concile sont certes fondamentaux, voire « historiques », pour l’avenir de l’orthodoxie, mais les difficultés demeurent nombreuses.
La question de la place des signes religieux musulmans dans l’espace public est posée de façon récurrente – et souvent polémique – ces dernières années en Europe, particulièrement en France. Aux yeux de certains, la réitération de ces débats confirmerait l’antinomie supposée du couple « islam et laïcité ». Pourtant, au même moment, les discussions exacerbées de l’assemblée constituante tunisienne autour du terme de laïcité et les questions similaires soulevées en Egypte après la chute de Hosni Moubarak, où le terme « Etat civil » (al-dawla al-madaniyya) a été aussi l’un des thèmes discutés, montrent à quel point la question de la place du religieux dans la sphère politique de certains Etats majoritairement musulmans n’est ni éludée ni réglée. Les débats ainsi mis au jour ébranlent le cliché de l’incompatibilité entre islam et laïcité, tout aussi tenace que celui du despotisme oriental. Une enquête historique, dans le temps long, sur la variété des rapports entre les musulmans et la laïcité dans toutes ses formulations permet de relativiser le caractère inédit des débats actuels et de prendre de la distance par rapport à une actualité dramatisée et aux clichés qu’elle véhicule.